Rabia

Entre les murs

Affiche Rabia

Après le très beau L’Orphelinat en 2008 qui a permis de révéler Juan Antonio Bayona, Guillermo Del Toro continue, via son activité de producteur, à mettre en lumière des jeunes cinéastes espagnols, avec deux noms à retenir pour 2010 : Sebastián Cordero pour le film qui nous intéresse et Guillem Moraes, réalisateur des Yeux De Julia.


Rabia, donc, est l’histoire de José Maria et Rosa, couple d’immigrés sud-américains essayant de faire leur vie à Madrid malgré leurs modeste condition (lui est ouvrier sur un chantier, elle est domestique au service d’un riche famille). Suite à une provocation de trop, José Maria tue accidentellement son patron. Afin d’échapper à la police, il part se réfugier dans le grenier de la maison où travaille Rosa sans qu’elle le sache…

Un tel postulat peut surprendre dans la mesure où le nom de Guillermo Del Toro évoque irrémédiablement le cinéma fantastique. En effet ici point de fantôme, de créatures mythologiques ou de vampires, seulement un quasi huis-clos dans lequel évolue moins de dix personnages. Et pourtant, Rabia fait écho par certains aspects à l’un des chefs-d’œuvres de la filmographie du mexicain : L’Échine Du Diable. A commencer par la mise en scène de la maison, tout en travelling à hauteur d’homme, cherchant à faire ressentir le gigantisme de la bâtisse, en contrepoint de l’exiguïté de la chambre de José Maria.

Rabia
 

Mais si son architecture extérieure est moins "carnassière" de l’extérieure que l’orphelinat du film de Del Toro, la maison n’en reste pas moins le théâtre d’une lutte territoriale et le lieu de drames (que nous ne dévoilerons pas) étouffés soit par le hors-champ, soit par une mise en scène "neutre" qui se refuse à toute complaisance.
Neutralité présente aussi dans les cadrages où les regards ne sont pratiquement jamais captés de façon directe par l’objectif mais toujours légèrement décalé avec peu de plans larges, y compris lorsque la rage (rabia en espagnol) de José Maria s’exprime envers le jeune garagiste l’ayant insulté, lui et Rosa. Au contraire même, les plans larges dévoilant José Maria en entier apparaissent lorsque celui-ci, caché dans la maison, ne peut agir, le reléguant au statut de témoin impuissant, le cadre devant subitement trop grand pour sa colère.
C’est d’ailleurs cette question de l’espace qui rapproche Rabia de la ghost story : le territoire qu’occupe José Maria le condamne à devenir invisible, lui qui essaie d’exister, de se manifester sans se trahir via les téléphones de la maison, là où Rosa, a priori invisible commence à être intégrer peu à peu comme un élément de la famille Torres.
Et c’est quand survient la fin, ouverte, que l’on comprend que les fantômes sont peut-être plus proches de nous qu’on ne le pense…

7/10
RABIA

Réalisateur : Sebastián Cordero
Scénario : Sebastiá Cordero d’après le romand de Sergio Bizzio
Production : Guillermo Del Toro, Alvaro Augustin
Photo : Enrique Chediak
Montage : David Gallart
Bande originale : Lucio Godoy
Origine : Espagne, Mexique, Colombie
Durée : 1h35
Sortie française : 2 juin 2010




   

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